L’intelligence artificielle aux Assises du livre numérique

Par : Dario Alcide

24/11/2017

Retour sur les Assises du livre numérique qui se sont tenues le 23 novembre 2017, à Paris.

Organisées depuis 2008 par le Syndicat National du Livre, les Assises du livre numérique se sont penchées principalement sur la montée en puissance de l’intelligence artificielle. Qu’il s’agisse de faire le point sur ce que l’IA a déjà apporté à l’édition, de définir les contours de nouvelles applications pour les métiers du livre ou encore de démystifier des termes comme « machine learning » ou « réseaux neuronaux », les différents intervenants ont eu à cœur d’apporter des voies de réflexion sur la transformation numérique des métiers du livre.

Le livre numérique se porte bien

Lorsque Vincent Montagne (Président du Syndicat national de l’édition) ouvre les Assises, il insiste sur le dynamisme du marché du livre numérique. Ainsi en 2016, le livre numérique représente 9% du chiffre d’affaire, soit une augmentation de 30%. La croissance est principalement portée par les secteurs scolaire, juridique et littéraire. La littérature malgré tout ne représente que 4% des ventes chez les éditeurs. Si l’augmentation n’est que de 6% dans ce secteur, la tendance reste légèrement à la hausse.

Plus tard dans la journée, Bruno Jeanbart (Directeur général adjoint chez OpinionWay) enfonce le clou en présentant le bilan des évolutions mesurées par le Baromètre des usages des lecteurs de livres numériques depuis 5 ans. Car le nombre de lecteurs d’e-book a quadruplé depuis 2012, passant de 5 à 21%. Il nous apprend également, si cela était nécessaire, que les lecteurs de livres numériques sont avant tout de grands lecteurs. 62% d’entre eux ont ainsi également lu un livre au format papier au cours du mois précédent leur interview, contre seulement 38% des lecteurs non numériques. S’ils sont plus nombreux, les consommateurs de livres numériques ont en revanche une consommation stable, selon le baromètre. Du point de vue de l’équipement, si les liseuses et les tablettes occupent toujours le haut du classement en matière de support de lecture (respectivement 83 et 67%), elles sont en légère baisse au profit du smartphone qui est utilisé par 34% des lecteurs d’e-book. 30% des lecteurs utilisent également, au moins de temps en temps, plusieurs appareils pour lire le même livre.

Autre phénomène important, noté par l’étude, les lecteurs au format numérique dépensent peu. 44% d’entre eux ont constitué tout ou partie de leur bibliothèque avec des ouvrages à moins de 4€. 73% se procurent des œuvres du domaine public et 24% ne téléchargent que ce genre de lecture gratuite. 

Enfin, le téléchargement illégal de livres numériques ne concerne « que » 14% des usagers (4% avouent télécharger tous leurs livres numériques de manière illégale). Si le chiffre de 14% reste élevé, il est intéressant de noter qu’il reste moins fort que dans les domaines de la musique (41%), du cinéma et des séries (38%) ou les logiciels (27%). Par ailleurs, malgré l’augmentation du nombre d’utilisateurs en 5 ans, la proportion de téléchargement illégale reste stable, voire légèrement en baisse (17% en 2012).

L’intelligence artificielle au cœur des assises

Les Assises du livre numérique en 2017, c’était donc également l’occasion de parler d’un sujet à la mode dans tous les secteurs aujourd’hui : la transformation digitale et l’intelligence artificielle en particulier.

Invité à inaugurer cette 18ème édition des assises, Michael Tamblyn, PDG de Kobo, a rappelé que les intelligences artificielles se nourrissaient avant tout de très nombreuses données sur les utilisateurs inscrits en ligne. C’est ainsi que lorsqu’un lecteur achète plusieurs fois sur un même site, les algorithmes de recommandation sont capables, en fonction de ses anciennes lectures et des lectures d’autres clients ayant eu des choix similaires, de proposer un livre qui puisse correspondre aux envies de ce lecteur. Mais Michael voudrait aller plus loin et souhaite que les IA puissent également surprendre le lecteur en lui proposant des ouvrages qui sortiraient un peu des habitudes du lecteur tout en ayant les qualités que ce dernier recherche. En clair, il voudrait que l’intelligence des algorithmes de recommandation fonctionne comme un véritable libraire qui connait parfaitement tous les livres disponibles dans sa bibliothèque mais également parfaitement tous les goûts de tous ses clients. 

De son côté, et parmi d’autres sujets abordés lors de cette journée, Gilles Dowek, directeur de recherche à l’INRIA, propose que l’intelligence artificielle soit capable de venir en aide aux éditeurs dans leur métier de tous les jours. S’il estime que, peut-être, nous ne sommes pas encore psychologiquement prêts à admettre que les manuscrits soumis aux maisons d’édition soient pré-triés par une intelligence lectrice, il explique que ce n’est aujourd’hui pas un véritable problème, techniquement parlant.

Dans un autre domaine et cette fois, pour venir en aide aux lecteurs, Marion Berthaut, directrice associée chez MOBiDYS, présentait un moteur d’analyse sémantique du langage permettant d’alléger l’effort cognitif des lecteurs DYS. Grâce à cette technologie, et sans altérer les textes d’origine, MOBiDYS permet de « mettre en accessibilité » les ouvrages dans un format numérique, à l’image de la nouvelle collection « J’aime lire DYS » disponible à partir du 18 décembre aux éditions Bayard. 

Le monde de l’édition semble donc bien équipé pour aborder la transformation numérique et s’il reste encore quelques défis – comme aider les IA à faire la différence entre un martyr sur un grill et un barbecue sur les enluminures de manuscrits de la BNF –, il y a également de belles opportunités, avec par exemple l’aide à la lecture pour les malvoyants. 

TEMPS DE LECTURE: 3 minutes

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